Carole Fives Térébenthine Gallimard, 2020, 173 p. ISBN 9782072869808 16,50 euros
De retour à la fête du livre de Saint-Etienne en octobre 2020, après un roman remarqué Tenir jusqu'à l'aube (finaliste de nombreux prix en 2018 dont l'avant dernier prix Landerneau Leclerc), l'auteure lyonnaise Carole Fives revient pour son prochain roman Térébenthine publié chez Gallimard. Le roman est paru le 20 août 2020 pour la rentrée littéraire de la fin de l'été.
Dans son dernier roman Térébenthine, l'auteure nous raconte le parcours de trois étudiants aux Beaux-arts (expérience étudiante que Carole Fives qu'elle a elle-même vécue). Le déclencheur de ce texte a été le suicide de son professeur de peinture aux Beaux-arts Iskander Nougmanov dit Déric. Elle nous conte avec finesse le réel décalage entre la vocation artistique et la réalité des années d'enseignement des Beaux-Arts où les étudiants sont plutôt orientés en direction des arts visuels que vers le dessin ou la peinture contrairement à leurs passions primitives. A chaque fin de cycle d'étude, les étudiants doivent présenter un projet artistique conforme à l'opinion de leurs professeurs pour accéder à l'année supérieure et ainsi obtenir au final leur diplôme au prix de quelques concessions artistiques ! A la lecture de cet intéressant roman, la double surprise de ce livre réside dans la volonté de certains enseignants de décourager les vocations artistiques de ces étudiants par tous les moyens et les tentatives de dragues lourdes d'un enseignant vis-à-vis d'une étudiante qui sont les marques d'un profond malaise ressenti par la narratrice de l'histoire.
Ce nouveau roman de Carole Fives est écrit finement et il plaira sans aucun doute déjà aux amateurs d'histoire de l'art. Sans surprise, ce roman concourra pour la course aux prix littéraires de l'automne.
Deux extraits marquants :
« La dernière année est consacrée au mémoire, il faut théoriser, rappele l'équipe enseignante. Ce n'est pas parce qu'on est étudiant aux Beaux-Arts qu'on est complètement décérébré. Mais tu as beau répéter aux professeurs, toujours aussi déconcertés par ta pratique picturale, que si tu peins c'est parce que tu ne sais pas t'exprimer autrement, ils réclament un discours, de l'écrit, du sens. Du concept. Un artiste à la fin du XXè siècle ne peut pas se contenter de produire des œuvres, il doit aussi produire leur explication. Il doit être le premier critique de son travail. Le discours compte plus que l'objet, voire le remplace. Sinon, c'est de l'art brut ! L'art brut des fous, des enfants à la limite. » (page 103)
« Tu réalises un peu tard que tu as pris l'exact contrepied de Véra Mornaypuisque tu t'apprêtes à montrer au jury la transformation majeure qui a traversé ta dernière année aux Beau-Arts, le passage de l'image aux mots. Pour cela, tu as installé plusieurs grands formats aux cimaises de la salle d'examen. Et un petit tabouret sur lequel tu as posé un texte. Ton premier texte. Sur la page de garde, tu as écrit ton nom de plume, celui que tu t'es choisi. C'était un objectif depuis ton adolescence, pouvoir changer de nom sans te marier. Voilà que l'art te permet. » (page 125)
Quatrième de couverture
La présentation de l'ouvrage précise que « certains, ou plutôt devrais-je dire certaines, se sont étonnés du peu d’artistes femmes citées dans notre programme d’histoire de l’art. Je leur ai donné carte blanche aujourd’hui. Mesdemoiselles, c’est à vous ! Quand la narratrice s’inscrit aux Beaux-Arts, au début des années 2000, la peinture est considérée comme morte. Les professeurs découragent les vocations, les galeries n’exposent plus de toiles. Devenir peintre est pourtant son rêve. Celui aussi de Luc et Lucie, avec qui elle forme un groupe quasi clandestin dans les sous-sols de l’école. Un lieu de création en marge, en rupture. Pendant ces années d’apprentissage, leur petit groupe affronte les humiliations et le mépris. L’avenir semble bouché. Mais quelque chose résiste, intensément. »
Carole Fives
Après une licence de philosophie, Carole Fives entre à l'école des beaux-arts où elle obtient le diplôme national supérieur d'expression plastique (DNSEP). Elle a enseigné les arts plastiques dans la région de Lille pendant douze ans où elle prend pour pseudo littéraire le nom d'un quartier populaire lillois : « Fives ». En 2010 paraît un premier recueil de nouvelles, Quand nous serons heureux (Passage/Points Seuil). En 2018, le roman Tenir jusqu’à l’aube est présent sur les listes des prix Fnac, Médicis et Wepler. Il est en cours d’adaptation pour le cinéma.
Le site de l'auteur :
http://carolefives.free.fr/?cat=5
L'interview de Carole Fives par Radio Nova :
https://www.nova.fr/dans-la-rue-de-carole-fives
Le lien vers l'éditeur Gallimard :
http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Blanche/Terebenthine
Date de dernière mise à jour : 16/10/2020